jeudi 28 avril 2016

Les deux soeurs de Béthanie


LES DEUX SOEURS DE
BÉTHANIE
 
"Une femme du nom de Marthe le reçut dans sa maison. Elle avait une soeur nom­mée Marie qui s'était assise aux pieds du Maître et écoutait sa parole. Marthe s'affairait au service..." (Lc 10,38-40.)

       Les Pères de l'Eglise, lorsqu'ils commentent la scène d'hospitalité de Béthanie, se plaisent à souligner la supériorité de la contemplation sur l'action. L'Ecriture a cependant soixante-dix sens. Jamais un sens n'est capable d'épuiser toute la richesse du texte sacré. Aussi voudrions-nous tenter une autre interprétation.
 
Marthe ou la femme aliénée
En Orient l'hospitalité est sacrée. La Bible en témoigne. Marthe, une femme de son peuple, se dépense pour bien recevoir Jésus. Elle obéit à l'idéal de la femme que la société orientale a définie. La maîtresse de la maison est la servante et la domestique dévouée de l'homme. On pourrait dire que Marthe est le type de la femme enfermée dans l'idée qu'elle s'est faite de sa condition. Marthe s'identifie tellement à cette condition de servante qu'elle trouve anormale l'attitude de sa soeur. Pour elle la place de la femme est là où se fait le service.
Jésus reproche à Marthe de trop s'affairer et d'oublier l'unique nécessaire. Il ne méprise pas les soins domestiques. Plus d'une fois, avec ses apôtres il a été content d'en bénéficier. En reprochant à Marthe son affairement, il l'invite à ne pas se laisser aliéner par le service. En effet, le travail peut devenir une aliénation, "un divertissement", dirait Pascal. On peut se laisser polariser tellement par le travail qu'on se ferme à toute autre recherche.
Jésus refuse d'enfermer la femme dans son rôle utilitaire et domestique. Il ne la considère pas comme un moyen, un instrument au service de l'homme. Elle n'est pas une fonction à laquelle la société des hommes tend à l'identifier, elle est une vocation. La tradition juive le rappelait lorsqu'elle confiait à la femme la mission d'allumer la lumière le soir du sabbat. La femme doit transmettre la lumière de l'espérance. La femme est appelée à sublimer la condition à laquelle l'homme voudrait la réduire. Elle est ap­pelée à vivre dans la lumière du Royaume, à faire elle aussi l'expérience de la tendresse de Dieu. La remarque que Jésus fait à Marthe est d'ordre pédagogique. Il veut l'éveiller à une nouvelle conscience de soi, à une part d'elle-même qui dépasse le rôle auquel la société la réduit. A la femme devenue étrangère à elle-même parce qu'elle n'est plus qu'une esclave du travail Jésus rend sa dignité.
Marie a choisi la meilleure part
     Marie écoute la parole de Jésus. En hébreu le verbe écouter ne s'applique pas seu­lement à l'ouïe. Il signifie obéir, mettre en pratique. Jésus loue Marie d'avoir choisi. Choisir, c'est faire appel à sa liberté. Nul ne peut imposer à la femme d'exister de façon authentique. La femme ne se réalise que si elle le choisit.
La femme doit trouver le chemin de la liberté. C'est la liberté qui lui permet d'écouter, de suivre le Maître.
Le chemin de la liberté est aussi le chemin de la gratuité. Marthe se sait efficace et rentable. Elle se sait utile à la société. C'est pour cela qu'elle se permet d'interpeler sa soeur. Marie ne fait rien apparemment. Rien qui se puisse voir et mesurer. Elle écoute en silence. Elle accueille le Royaume que Jésus annonce. Elle l'accueille dans sa gratuité. La parole de Dieu, sortie du silence du Père, demande à être reçue en silence. Appren­dre à écouter en silence, entrer dans le silence de Dieu, c'est plus difficile que de tra­vailler. On ne voit aucun résultat immédiat. On est accusé d'être un être inutile pour la société. Or le chemin de la libération authentique passe par cette écoute et ce silence. Le Royaume de Dieu est don de la liberté et de la dignité humaines. Encore faut-il savoir écouter la parole sortie du silence et le silence de Dieu à Béthanie et au Calvaire. De là dépend la vraie libération de l'homme et de la femme.
Cf. extrait de la revue : la Terre sainte, écrit par Frédéric Manns, ofm

mardi 12 avril 2016

Lévi ou Mathieu


QUESTION: — Pourquoi identifie-t-on Lévi, apôtre appelé par Jésus (Luc 5, 27-32), à saint Matthieu ?

REPONSE: — S'ils diffèrent au sujet du nom, Matthieu ou Lévi, les trois récits évangéliques de la vocation du publicain (Luc 5, 27-32 — Matthieu 9, 9-13 — Marc 2, 13-17) se ressemblent pour le fond et pour le style. Je vous invite à lire les textes cités pour vérifier le changement d’identité.

En outre, ils sont placés dans le même ensemble de l'histoire de Jésus. Ils sont précédés tous trois du même miracle, la guérison du paralytique de Capharnaüm et suivis du repas offert par le publicain à Jésus et à ses disciples avec les mêmes circonstances du blâme des pharisiens et de la réponse du Maître. Ils rapportent donc le même fait. Les différents noms du héros ne s'opposent pas à l'identité de la personne, car plusieurs autres personnages évangéliques ont porté deux noms, non seulement un nom hébreu et un nom grec ou latin, mais même deux noms hébreux. L'analogie avec Simon, surnommé Céphas, et Joseph surnommé Barsabas, permet de conclure que Lévi était le nom juif du publicain, et Matthieu, le surnom qu'il reçut comme chrétien.

Cf. : Feuillet biblique no 42